« S’il existait un gouvernement qui eut intérêt à corrompre ses gouvernés, il n’aurait qu’à encourager l’usage du cannabis »
Baudelaire

Le système tribal, le clanisme, la féodalité ainsi que les mafias constituent des formes de sociétés organisées qui concilient leur histoire anthropologique, par là-même intemporelle, et la conquête du présent sous la forme du pouvoir.

Il est tout à fait significatif que ce pouvoir reconnu aux dieux se soit traduit dans la mythologie par une dévolution à certaines femmes et à certains hommes qui les prédestinaient à l’exercice de ce pouvoir sans qu’il soit besoin de leur conférer une légitimité qui résulte de l’expression de la volonté populaire.

Mais c’est tout de même sous ces auspices que devait naître la démocratie.

Les balbutiements de l’histoire, l’instinct de conservation, la soif de puissance ont laissé pendant longtemps prévaloir la suprématie de la force et de la violence seules susceptibles de permettre la conquête des richesses et le maintien d’un ordre social qui concilie les revendications du peuple et la mégalomanie de ceux qui n’aspirent qu’à son asservissement.

Cet asservissement n’intervient qu’au seul profit de ceux qui prétendent au pouvoir de façon plus ou moins légitime aussi a-t-il pris les formes les plus diverses au cours de l’histoire.

Qu’il s’agisse de l’esclavage de celui qui procède de la naissance ou du tribut payé par le vaincu, qu’il s’agisse du servage la condition d’homme libre a toujours été relative et écartelée entre la nécessité d’assurer sa survie, la nourriture des siens et l’abdication de tout ou partie de sa dignité et de sa liberté.

Cette servitude, plus ou moins volontaire, proclamée par La Boétie a suivie l’évolution du temps et, par conséquent du progrès, de la technologie, les instruments médiatiques participant à la fois sur le plan intellectuel et moral mais également sur le plan psychique à réduire la vigilance voire même à annihiler tout sens critique.

Ce progrès ne devait pas diminuer la portée des instincts les plus bestiaux se traduisant sous la forme de la violence pouvant, sous l’influence de l’absence de scrupule voire du délire, atteindre les formes les plus barbares qui ont eu pour conséquence et pour apogée certains génocides et l’avènement du système mafieux.

Il n’existe pas de complot mondial, mais des convergences d’intérêts qui ont amené des femmes et des hommes dépourvus de tout scrupule et de toute illusion à manipuler et à dominer leurs semblables.

En effet, l’absence d’illusions et de scrupules est la source première de toutes les formes de pouvoir.

A contrario le respect des valeurs qui fondent l’humanité dans sa dimension intemporelle et temporelle ne doit pas être un moyen utilisé par le pouvoir criminel pour l’asservir et l’humilier.

Les droits de l’Homme détournés de leur vocation humaniste, la culpabilisation à outrance des Français pour mieux les désarmer, autant de moyens insidieux et pervers de conquête du pouvoir.

L’attrait pour le secteur bancaire et financier s’est avéré une évidence pour la criminalité organisée ainsi que pour le terrorisme.

La notion d’organisation criminelle englobe non seulement les mafias et certains mouvements terroristes mais également les oligarchies dont l’assise financière repose sur l’illégalité voire même sur le crime.

C’est ce qui explique que cette mainmise de la criminalité sur le secteur bancaire et financier notamment par l’intermédiaire des fonds d’investissements et des paradis fiscaux a eu un retentissement non seulement sur le plan économique mais également sur le comportement de tous les responsables et collaborateurs de ce secteur qui se sont sentis investis d’un pouvoir sans partage, méprisant le Juge et la Loi et a fortiori tous ceux qui sont susceptibles de dépendre de son bon vouloir, c’est-à-dire certains politiciens.

Le paroxysme a été atteint lorsque ces organisations criminelles et la finance mondiale ont passé ce pacte non écrit « La maîtrise du monde par le trafic de la drogue ».

Quelle meilleure arme que ce poison qui annihile les défenses de l’esprit, détruit la conscience de celui qui l’absorbe et enrichit celui qui l’inocule.

Il ne manquait plus que les moyens juridiques et comptables pour introduire dans l’économie cette arme de destruction massive : la finance criminelle.

Le dévoiement de la modélisation mathématique, la sophistication des produits financiers sont autant de moyens de dissimuler cette pénétration de l’argent criminel dans l’économie en s’appuyant également sur la corruption de certaines institutions juridiques et comptables, qu’il s’agisse des fondations et des trusts, qu’il s’agisse des normes comptables qui favorisent la valorisation des actions sur la base de cours de bourse manipulés.

En effet, le blanchiment et les marchés financier ont permis cet aboutissement, la conquête des richesses d’un pays autrement que par l’utilisation des armes conventionnelles.

La pénétration de l’argent criminel dans l’économie légale satisfait plusieurs objectifs dont la liste ne saurait être exhaustive :

- Le premier est bien entendu celui de la spéculation et de l’enrichissement ;

En effet, la masse de capitaux mobilisés est telle qu’elle pèse sur le cours des valeurs et ce d’autant plus dans le cas où les opérateurs sous la contrainte des organisations criminelles favorisent la baisse ou la hausse des cours de bourse.

Savoir avant tout le monde qu’une valeur va chuter ou bien qu’elle va vers la hausse peut relever du délit d’initié, mais faire en sorte qu’une valeur chute pour pouvoir l’acquérir puis qu’elle s’oriente de plus en plus vers la hausse pour la vendre le plus cher possible constitue tout simplement ainsi que l’ont qualifié, non seulement des journalistes, mais également des magistrats et des policiers, une arnaque.

- Le deuxième objectif est sans nul doute la conquête du pouvoir puisque cette manne financière dont on peut ainsi occulter la provenance permet la conquête de pans entiers de l’économie mais également une prédation en supprimant des concurrents qui ne peuvent bien entendu lutter avec les moyens financiers dont ils disposent.

Cette acceptation de cette manne financière va également peser sur le comportement des dirigeants des entreprises concernées et va avoir un retentissement sur le mode de gestion de l’entreprise ainsi que sur la façon de traiter les collaborateurs.

- Le troisième objectif qui a été souvent décrit par ceux qui analysent le processus de blanchiment est de permettre aux entreprises mal gérées ou bien délibérément engagées dans des malversations économiques et financières de bénéficier de cette manne et de perdurer dans leurs malversations.

- Le quatrième objectif permet tout simplement de masquer l’incompétence des experts, des journalistes et des professionnels qui ont manipulé et continuent de manipuler les indices, les statistiques, uniquement dans le but de satisfaire leurs dogmes fondés sur l’économie et la finance.

L’échec manifeste de cette économie doit être bien entendu dissimulé, voire nié :
- D’une part, pour protéger les intérêts de ceux qui l’ont mis en place ;
- D’autre part, pour occulter l’incompétence des prétendus spécialistes, c’est-à-dire leurs responsabilités, voire même dans certains cas leur complicité, c’est-à-dire dans ce cas leur culpabilité.

Il suffit pour s’en convaincre de constater que l’information financière ne fait jamais mention de l’économie souterraine qui gangrène certains pays et qui constitue une concurrence déloyale portant atteinte non seulement au niveau de vie de chaque citoyen mais également à sa conscience morale et en sa croyance dans les valeurs de la république.

Cette information élude totalement la pénétration de l’argent criminel et les dommages collatéraux qu’elle provoque puisque cette puissance prédatrice fausse totalement les paramètres qui permettent la mise en place d’une économie fondée sur des normes comptables qui procèdent nécessairement d’actes ou de faits juridiques et qui doivent par conséquent permettre à la règle de droit de s’appliquer.

La démocratie en exigeant la transparence rend honneur à tous ceux qui ont fait le choix de ne pas tuer, de ne pas trahir, de ne pas voler puisque ce n’est pas la fortune qu’il faut condamner mais la manière de l’acquérir et de l’employer.

Dans un tel contexte, seuls le droit et la justice ont vocation à remplir les fonctions régaliennes et religieuses qui étaient auparavant dévolues aux souverains du temporel et de l’intemporel.

Roland SANVITI

 

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