Les liens qui existent entre l’insécurité quotidienne et la crise financière mondiale sont nombreux.

Ils sont d’ordre sociologique, économique, financier et criminel et se résument aujourd’hui à un constat accablant pour les citoyens français : l’impuissance de l’Etat.

En effet, l’insécurité ne doit plus être considérée comme un fait divers anodin, la répétition, plous ou moins occultée par les statistiques, des délits et des crimes qui se commettent sur le territoire de la République française.

Il s’agit, en réalité, d’une nouvelle forme de guerre.

Dès l’instant où il n’est pas question d’utiliser des armes conventionnelles, cette nouvelle forme de guerre de conquête s’appuie sur des actes criminels et terroristes financés, en très grande partie, par le trafic de drogue.

En moins de trente ans, les zones de non-droit se sont étendues :

- Tout d’abord, les atteintes aux personnes et les règlements de compte se sont multipliés,
- Dans certaines zones, la Police et même les pompiers ne peuvent plus pénétrer sans encourir le risque pour la vie de leurs agents,
- Les règlements de compte se poursuivent jusque dans les collèges et les lycées.

Indépendamment des quartiers qui subissent cette mainmise tout à fait inadmissible, il faut également tenir compte de l’insécurité qui règne dans les transports publics.

La terreur que font régner ces bandes qui n’ont pas hésité, à plusieurs reprises, à violer des jeunes femmes, à molester, voire même tuer des passants, accroit le sentiment des citoyens d’une impuissance de l’Etat confrontée à cette criminalité.

Il en résulte, non seulement un malaise et un profond sentiment d’injustice, puisque les citoyens qui travaillent offrent une vulnérabilité face à toutes les formes de contrôles et de répressions policières qui sont ainsi perçues par eux comme des formes d’abus de pouvoir ou d’abus de droit.

L’image actuellement offerte aux citoyens français est celle d’un Etat impuissant face à la criminalité et notamment au trafic de la drogue dont le blanchiment des fonds qu’elle procure vient augmenter les produits financiers.

L’exemple, pour les plus jeunes est, bien entendu, catastrophique puisqu’il est difficile de les encourager dans la voie du travail et de l’effort, tandis que le spectacle qui leur est offert est celui de l’argent facile qui permet, non seulement d’apporter du bien-être matériel, mais également d’inspirer la crainte et de s’exonérer, par conséquent, du respect de la loi qui doit s’imposer à tout citoyen de la République française.
Or, l’exemple de comportement délictuel voire criminel, se retrouve à l’échelon mondial comme le révèle l’analyse des moyens qui sont utilisés pour permettre le blanchiment de cet argent sur les places financières.

Les citoyens français assistent à une dépossession de leurs droits, de leur terre, de leurs libertés et, bien entendu, de leur sécurité, l’Etat n’assumant plus ses fonctions régaliennes essentielles, à savoir : la protection des biens et des personnes et l’application de la loi égale pour tous.

Le paradoxe de la fin du XXème siècle aura été d’avoir vu à la fois l’épanouissement de la recherche scientifique et technologique tant sur le plan médical que sur le plan industriel ; l’informatique s’avérant être un accélérateur de la pensée et un moyen de communication extraordinaires tandis qu’en revanche, sur le plan démocratique et institutionnel, un progrès très peu significatif, voire un recul dans les pays où l’on s’y attendait le moins.

La conception archaïque du pouvoir relève tout autant du domaine de la psychologie que du domaine géopolitique, chacun à toutes les époques ayant été contraint d’utiliser les armes dont il disposait.

Les premières armes sont nécessairement les capacités intellectuelles et physiques mais, par ce que la guerre est la forme la plus accomplie de la situation de non-droit, la ruse, la trahison ont pu être érigées en valeur que Machiavel reconnaît et enseigne mais que la morale universelle réprouve.

A l’heure de la relecture de l’histoire, il ne faut pas que celle aujourd’hui écrite souffre de la même maladie car la démocratie impose non seulement la transparence et la connaissance, mais également le respect de la loi égale pour tous.

L’étude de l’histoire nous apprend que la seule légitimité du pouvoir a toujours reposé sur la protection des personnes et des biens, la contrepartie des privilèges des dirigeants reposant sur le service, voire le sacrifice de leur propre vie.

La corruption des hommes par l’argent et, par conséquent, des institutions a toujours existé.

Qu’il s’agisse de soudoyer son ennemi, d’apaiser l’ambition de ses amis, le clientélisme a évolué et s’est adapté à la forme du pays ou de la région afin de satisfaire les besoins de chacun.

Ce passage du système clanique ou tribal au système féodal pour déboucher sur le système mafieux démontre la constance d’un comportement génétiquement programmé qui ne permet le progrès de l’humanité qu’à la suite de réactions successives à des agressions répétées.

Malheureusement, les champs de bataille ont été le terreau du génie humain lorsqu’il s’est agi de sublimer la violence pour la convertir en acte chirurgical ou bien de tirer partie des inventions militaires pour les mettre au service de la société civile.

De la même façon, sur les champs de bataille de la guerre financière ont été utilisés des écrans et des fusibles sacrifiés sur l’autel de la spéculation, la crise financière en ayant révélé les limites.
Il suffit de rappeler que, au mois de décembre 2006, la Tribune titrait « 3,600 milliard de dollars de fusions-acquisitions en 2006 » et que, au mois de janvier 2007, la même Tribune titrait « Le trésor des fonds d’investissements : 600 milliards en quête de cibles ».

A cette lecture, la première question qui pouvait venir à l’esprit concernait la provenance de ces capitaux.

La réponse se trouve dans les articles et les ouvrages consacrés au blanchiment de l’argent criminel depuis une trentaine d’années, mais leur abondance est telle qu’il est impossible de les citer.

Cependant, qu’il s’agisse de professeurs d’économie comme Henri BOURGUINAT ou Alain COTTA, qu’il s’agisse de magistrats ou de journalistes, tous les auteurs sont unanimes à considérer que la pénétration de l’argent criminel dans les circuits économiques légaux, notamment par l’intermédiaire des marchés financiers et des paradis fiscaux, a effectivement permis à des femmes et à des hommes de disposer d’une capacité de conquête et de destruction considérable.

Par l’intermédiaire de sociétés de fonds d’investissements dont l’opacité n’est plus à démontrer, il a été, en effet, possible de conquérir des pans entiers de l’économie d’un pays, mais, bien plus inquiétant, il a également été possible de les détruire en supprimant son secteur industriel, en contraignant ses entreprises à délocaliser.

Face à de telles attaques, chaque jour orchestrées sur les places financières par la voie de pseudo-experts, il n’a été question que d’y opposer la régulation.

Ceux qui accompagnent cette mainmise de la finance sur la société civile ont trouvé ce terme de régulation lequel peut être admis lorsqu’il s’agit d’un fleuve ou de la lave d’un volcan dont il convient de réguler le cours mais, en l’espèce, il s’agit de s’opposer à des femmes et des hommes qui ont choisi de conquérir et de détruire sans aucun scrupule.

Or, ce n’est pas en régulant l’attaque que l’on gagne la guerre.

C’est pourquoi, une fois de plus, l’arbre ne doit pas cacher la forêt. Ce ne sont pas les hauts revenus de certains qui sont en cause. Ce sont ceux qui les leurs versent.

Mais quelle est la provenance des capitaux à « réguler » ?

Le Rapport moral de l’argent dans le monde, dont la Caisse des Dépôts assure, chaque année, la promotion, a révélé la dérive mafieuse d’une certaine spéculation financière.

La régulation est impossible, seule l’application de la loi et, par conséquent, l’adaptation de l’institution judiciaire à la mesure des enjeux actuels permettra de contrer la progression d’un tel fléau.

Dans l’absolu, rien ne droit freiner la possibilité d’atteindre de hauts revenus à la condition qu’il soit possible d’en appréhender la réelle contrepartie.

En réalité, l’arsenal législatif et règlementaire existe qui permet effectivement d’enrayer à chacun des stades de sa progression, la mise en place d’une spéculation délictuelle, voire criminelle.

L’unanimité s’est faite, peu à peu, autour de la conviction de chacun que les grands scandales financiers qui sont venus troubler l’économie mondiale, n’ont pu exister sans la corruption des institutions chargées d’en assurer le contrôle.

A l’heure de cette nouvelle féodalité mondiale, le débat droite/gauche qui oppose les Français, tout en intéressant un nombre de plus en plus restreint d’entre eux à l’occasion des élections, apparaît bien désuet et, malheureusement, peu enclin à établir un bon diagnostic de la situation actuelle et, par voie de conséquence, à permettre d’envisager les bons remèdes.

A noter d’ailleurs que, lorsqu’il s’agira d’amener la paix sociale, de rétablir un système de santé satisfaisant et de promouvoir une institution judiciaire garante de la sécurité des personnes et des biens, il n’existera pas de revenus suffisamment élevés pour rétribuer ceux qui auront contribué à promouvoir ces réformes.

 

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